Sécurité : Les Maliens entre terrorisme et ‘‘patriotisme’’
Malgré une détérioration très avancée de la situation sécuritaire, les Maliens en partie, ne désespèrent pas de la gestion faite de leur pays. Ils semblent d’ailleurs s’y complaire. Mais…
‘‘Et alors ? Où est donc le problème si ASSIMI se rend à l’Aéroport par hélico ? Si cette décision est de nature à lui éviter une attaque, pourquoi pas ? Qu’il procède désormais ainsi !’’. Devant ce petit magasin dans un quartier à Bamako, un jeune homme, la trentaine révolue, tente de convaincre une dizaine d’interlocuteurs sur le caractère onéreux et inutile, selon lui, du déplacement du Colonel Assimi Goïta par hélicoptère de Koulouba (Présidence de la République du Mali) à l’aéroport Bamako-Sénou où il a procédé mardi, 9 août, à la remise de nouveaux équipements à l’Armée.
Devant ses interlocuteurs, le jeune homme s’échine à expliquer que le déplacement de Koulouba à l’aéroport de Bamako (19 Km) du Président de la transition, est à la fois »un gaspillage » au plan économique et un manque d’assurance pour la population au plan sécuritaire. Nonobstant la pertinence de la remarque, la réaction ne s’est pas fait attendre. ‘‘Quand bien même ce sont des milliards [FCFA] qui sont investis pour la sécurité d’Assimi, c’est bien’’, répondit en chœur la petite foule.
C’est tout comme devant ce magasin, sur les réseaux et dans de nombreux petits coins de rassemblement, les Maliens prêtent très peu d’attention à la situation sécuritaire qui se dégrade sérieusement et de manière inquiétante. Tenez :
Le dimanche 07 août 2022, alors que cinq policiers étaient tués dans une embuscade sur l’axe Koury-Koutiala au sud du pays, au nord dans la région de Gao à Tessit, le camp des forces armées maliennes subissait une violente attaque ayant fait au moins 42 morts parmi les soldats, selon un dernier bilan officiel.
La veille, le vendredi 5 août, 12 civils ont été tués au centre du Mali dans le cercle de Bankass.
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En marge de ces drames, les forces armées maliennes ont fait face à de nombreuses attaques terroristes dont celle de Kati, le 22 juillet, à une dizaine de kilomètres de Bamako au nord-ouest. Malgré cette recrudescence de la situation sécuritaire, les Maliens restent confiants et très peu soucieux. Patriotisme, dit-on !
L’intox, la propagande, la désinformation comme armes de séduction
Retour dans notre ‘‘grin’’ devant le petit commerce. Si le ‘‘détracteur’’ du Colonel Assimi Goïta n’a pas pu convaincre ses interlocuteurs, ces derniers étaient finalement restés concentrés sur leurs Smartphones. Ils gardent tous (presque) une oreille attentive aux commentaires dans une vidéo sur l’acquisition de nouveaux appareils au bénéfice de l’armée de l’air du Mali.
‘‘Je vous dis, je vous le jure, il y a d’autres appareils qui n’ont pas été montrés au public. Les Russes ont dit de tenir ça secret !’’. C’est la voix d’un web-activiste. Il se prononce ainsi sur l’acquisition des quatre avions L 39 Albatros remis la veille à l’armée de l’air. Nous sommes mercredi soir, 10 août. Dans la même veine, l’annonce d’un deuil national de trois jours vient de tomber pour rendre hommage aux 42 soldats décédés le 7 août dans l’attaque de leur camp à Tessit.
Mais, l’euphorie de l’acquisition de nouveaux équipements et la conviction d’une trahison extérieure ont fait oublier à ces débatteurs de circonstances et à de nombreux Maliens, la douleur de la perte d’une quarantaine de soldats : ‘‘Si l’hélicoptère ennemi n’avait pas bombardé le camp, nos soldats auraient défait les terroristes à Tessit’’, dit une voix dans la petite foule. Mais quel bombardement ? Quel hélicoptère ? L’auteur de la déclaration dit l’avoir appris sur les réseaux sociaux. Et un autre de renchérir: ‘‘Tout ça, c’est la France !’’. Encore la France, la sempiternelle ennemie !
A l’autre bout du banc, toujours devant le magasin, un autre jeune homme concentré en solo sur son Smartphone, d’un fou rire s’éclate: ‘‘quelle humiliation pour ADO [le Président ivoirien Alassane Dramane Ouatara] ! L’un de ses hélicoptères est tombé en plein défilé !’’. L’allégation est-elle fondée ? Que non ! Une vraie fausse information.
Il s’agit en réalité de cette image de crash d’hélicoptère de l’armée ivoirienne survenu en novembre 2019, mais aujourd’hui sorti de son contexte par les internautes.
Tout y passe désormais au Mali : propagande, intox, désinformation, publication de fakes News, de deep-Fakes avec des montages vidéo souvent vraisemblables ! Mais à qui donc profite le crime ? Pas à l’Armée que l’on prétend défendre.
Face à la Presse le jeudi 11 août, les responsables de la Direction de l’Information et des Relations Publiques des Armées (DIRPA), ont ‘‘exhorté les uns et les autres à éviter la diffusion de fausses informations’’. Une session de formation à l’endroit des médias sera organisé dans ce sens très prochainement, a-t-on fait savoir.
Lindiscret.net
